Un rêve devenu réalité
Un abri de base, premier pas vers l'autonomie
Au moment de l’achat de la ferme, il n’y a aucun bâtiment.
Basset et Moi, on a toujours aimé les habitats ronds. Nous avons vécu quelques années dans une yourte, et pour notre première construction sur le terrain, on voulait aussi une forme arrondie. Une raison supplémentaire à ce choix : les vents violents. Notre parcelle est très exposée, et pour l’instant aucune haie ne nous protège. La forme ronde se prête donc bien pour répondre à cette contrainte. Cette habitation même si elle n’est pas permanente, nous aidera à remettre les zones du design dans l’ordre. Car la zone 1 dans notre plan se situe en haut du terrain où pour l’instant il n’y a rien et où l’eau du sondage de l’Etat que nous utilisons ne monte pas bien. Ce qui fait que, dans les faits, l’activité se concentre plus bas dans le terrain, dans une partie de l’olivaie.
Se former, une étape essentielle
En mars 2015 Basset a eu l’opportunité de suivre un stage d’initiation à la technique de superadobe, à l’Ecoferme de Mornag, enseigné par Davide et Donato de Videterra,ainsi que part Rabia Cherrif. Le superadobe consiste remplir des sacs, en général en polypropylène, d’un mélange de terre compactable pour obtenir la résistance nécessaire.
Le dôme nous permet de solutionner un autre problème concernant la toiture. Ici en Tunisie, le bois n’est pas produit localement et la toiture standard est un toit plat sur poutres en béton, couvert d’une chape aussi en béton.
Ne possédant pas les compétences sur d’autres techniques d’écoconstruction, le choix du superadobe nous a inspiré.
C'est parti!
On s’est donc lancé: première étape, les plans. Pour avoir la terre de remplissage, et bénéficier d’une meilleur isothermie, nous avons pensé à enterrer le dôme d’environ un mètre. Recherchant un espace répondant à nos besoins aujourd’hui mais aussi pouvant évoluer, on a décidé de faire un dôme assez grand pour ce type de construction, de 6 mètres de diamètre, et qui fera donc un peu moins de 6 mètres de haut. Pour utiliser des fenêtres et portes en notre possession, nous avons inclus quatre fenêtres, la porte au Sud. On a aussi planifié une mezzanine, à mi hauteur. Cette pièce disposera d’un point d’eau, et une voie d’évacuation a donc été prévue.
Les travaux ont commencé avec le creusement au tractopelle de la surface du dôme à 1 m de profondeur. La terre végétale a été mise à part. Ensuite, il restait encore beaucoup de travail pour affiner ce gros oeuvre. Il a fallu agrandir et cette opération de précision a pris beaucoup de temps. On s’est posé beaucoup de question quant aux fondations et aux risques d’infiltration d’eau. On voulait pas utiliser de plastic, pour envelopper les deux premières rangées comme on le voit parfois. On voulait pas non plus se lancer dans des fondations maçonnées… On a considéré que compte tenu du climat semi aride où on se trouve, on prenait pas beaucoup de risque. On a choisit de poser la construction sur un lit de gravier de 25 cm et de creuser un drain tout autour.
Grand dome, gros challenge
Vu la taille de la construction, le compas habituellement utilisé et constitué de deux chaînes ne pourra pas nous servir une fois dépassé la hauteur d’homme. Nous avons opté pour le compas métallique en forme de “voile” qui reprend la courbure du dôme et tourne sur un pivot central. Pour calculer la courbure il faut connaitre avec le plus de précision possible la largeur des sacs damés.
Mais finalement ce type de compas s’est révélé trop complexe à mettre en œuvre, et pas compatible avec la charpente de la mezzanine, ou les formes (genre de coffrage) remplissant les ouvertures. Nous avons donc fabriqué un compas composé d’un mât et d’un bras télescopique, dont on ajuste la longueur à chaque rangée.
Expérience du chantier participatif
Nous avons embauché pour quelques jours Davide et Donato pour lancer la construction sous le regard de personnes expérimentées et ce fût un choix vertueux, tant les “erreurs” des débutants que nous sommes s’étaient déjà accumulées. Ils nous ont aidé à formuler le mélange de terre dans les bonnes proportions, nous avons rectifié les erreurs du plan… On a voulu tester la formule chantier participatif, et une équipe de 5 personnes nous a rejoint. Et enfin on a pu commencer à remplir le premier “boudin”. La circonférence avoisine les 20 mètres, donc nous segmentons les anneaux de façons à pouvoir terminer toute section commencée. A la fin de cette semaine, deux rangs ont été montés, une fierté ! Un pas de fourmi néanmoins vu qu’il y aura une quarantaine de rangées à monter. Et même si la taille des anneaux diminue en montant, le travail ne vas pas vraiment plus vite car après vient la pose des fenêtres, et puis il faut monter le mélange… bref une vraie construction pharaonique.
Premier bilan
Au cours d’une deuxième semaine de chantier participatif, nous avons monté deux rangs supplémentaires et nous avons fait un premier bilan.
Cette technique demande un travail en équipe et nous n’avons pas pu rassembler une équipe stable de volontaires pour la durée totale du chantier, environ 2 mois. Donc après deux semaines de chantier, avec deux équipes différentes, cette stratégie a montré ses limites: à chaque nouvelle équipe, on doit reprendre deux ou trois jours de mise en route, et une fois le rythme trouvé, les personnes doivent partir. De plus, l’accueil de volontaires demande aussi une énergie et un travail supplémentaire, qu’il n’est pas facile de cumuler avec l’intensité du travail de la construction.
Le chantier est resté en pause pour l’été trop chaud et l’automne où nous sommes pris par les travaux de la ferme.
Reprise du chantier
En février 2016, après la récolte des olives, on a pu reprendre le chantier. Fort de nouvelles rencontres, nous avons pu cette fois rassembler une équipe prête à s’engager pour plusieurs semaines. En effet, malgré les difficultés, partager cette expérience avec des personnes volontaires correspond tout à fait notre état d’esprit.
Le chantier a quand même duré longtemps et à mis les corps des volontaires à rude épreuve. Mais quelle satisfaction de voir les murs monter! Pour autant ne croyez pas que le travail est plus rapide lorsque la taille des anneaux diminue: le fait de devoir acheminer le mélange en hauteur et aussi les précautions à respecter en travaillant si haut ralentissent le processus; finalement on avance à la même vitesse.
Les enduits, encore de la terre!
Ensuite c’est pas tout de monter les murs, il faut les protéger avec un enduit. Nous avons bien sûr opté pour un enduit de terre/paille puis la finition en chaux sable.
Et pour cette phase aussi, une équipe nous aurait permis d’avancer plus vite. Mais nous n’avons pas pu mobiliser encore des volontaires. Nous avons décidé d’embaucher 1 à 2 journaliers pour ne pas risquer d’abimer les murs. Et on se rend pas forcément compte, mais ce sont encore plusieurs tonnes de terre qu’il faut mélanger et appliquer pour avoir un rendu efficace et propre. La phase extérieure attend sa couche finale, restera les enduits intérieurs et l’aménagement qui se feront au fur et à mesure, car moins urgent. L’aventure n’est pas terminée!